Naissance
Jean Hoppenot est né le 4 février 1895 à Troyes dans une famille de 10 enfants.
Une grande figure,
l’une des plus pures
de la résistance auboise
Chef d’entreprise
Chef militaire départemental de l’armée secrète
Arrêté par la Gestapo le 4 février 1944
Déporté au camp d’Auschwitz le 27 avril 1944
Mort au camp d’extermination de Flossenbürg le 15 novembre 1944
Jean Hoppenot est né le 4 février 1895 à Troyes dans une famille de 10 enfants.
Engagé volontaire le 9 octobre 1914 au 29ème Dragon à Montpellier comme 2e classe, a été blessé cette même année. Il conquit tous ses galons : nommé successivement Brigadier, Maréchal des Logis, il entre le 15 août 1917 à l’École Militaire de Fontainebleau comme élève aspirant. À sa sortie fut nommé Aspirant et affecté au 208ème d’Artillerie comme Chef de Section, puis le 15 novembre 1917 Sous Lieutenant de Batterie.
Le 10 août 1918 est nommé Lieutenant et devint Commandant de Batterie. Le 20 mars 1919 occupe les mêmes fonctions au 7ème Régiment d’Artillerie jusqu’au 9 septembre 1919, date où il est mis en congé et démobilisé.
Le 11 septembre 1918 est cité à l’ordre du Jour du Régiment pour ses brillants états de service, puis décoré de la Croix de Guerre Française et de la Croix de Guerre Belge. Pour sa bravoure, le Roi Albert 1er le gratifia d’une lettre autographe.
Se marie en 1920, père de 4 enfants, il sera pendant 24 ans un époux et un père de famille heureux. Chef d’entreprise, il habitait avec sa famille une maison sise à Troyes au n° 43 de la rue Jules Lebocey.
En janvier puis février 1920 est nommé Sous-Lieutenant puis Lieutenant à titre définitif.
Le 13 mars 1933 est fait Chevalier de la Légion d’Honneur. Le 8 décembre 1933 devient Capitaine de réserve, et le 10 mars 1937 il lui est décerné la Médaille Inter Alliée dite Médaille de la Victoire et le 25 septembre 1937, il lui est accordé la Croix des Services Volontaires.
Pendant toute cette période, il suivit assidûment les cours d’officier de Réserve.
Fut rappelé en août 1939 ; affecté comme Capitaine au 37ème Régiment d’Artillerie Divisionnaire, est nommé adjoint au Chef d’Escadron du 1er Groupe.
Après l’hiver passé dans la région de Wissembourg, prit part activement à la très éprouvante bataille de la Somme, où le 5 et 6 juin 1940 le Régiment subit l’assaut des panzers allemands.
Suite à la rupture du front d’Amiens, la retraite fut très pénible et délicate, particulièrement au passage de l’Oise et de la Loire.
Très apprécié par ses supérieurs, il a été considéré comme un excellent officier. Aimé de ses camarades officiers, il entretenait avec eux d’excellents rapports malgré sa fonction délicate.
Droit, esprit noble, ayant un rapport chaleureux, il avait une autorité naturelle du fait de son caractère hors du commun, et de la très grande opinion qu’il avait de tous les hommes. Né chef, il lui était naturel de commander.
Plusieurs des jeunes officiers en contacts fréquents avec lui avaient une très grande estime et l’admiraient.
Le 1er juillet 1940 a été cité à l’ordre du Régiment ; le libellé fait mention de toutes ses qualités au combat.
Cette citation comporte l’attribution de la Croix de Guerre avec étoile.
A été démobilisé le 24 juillet 1940 en Dordogne, région où le 37ème a abouti à la fin de sa longue retraite.
En novembre 1940, avec le Lieutenant Wauters (qui semble être le premier résistant de l’Aube à appartenir à un mouvement organisé), il commença son activité clandestine contre l’occupant : il devait devenir l’organisateur de la Résistance de l’Aube dans le cadre du mouvement « Ceux de la Libération » C.D.L.L.
Le patron de ce mouvement était un dénommé « Lenormand » pseudonyme donné à Roger Coquoin, un de ses amis et compagnon de guerre, en qui il avait toute confiance. Auprès de lui, il allait chercher à Paris mots d’ordres et consignes pour établir la liaison.
Début 1941 Le Lieutenant Wauters devint Délégué Militaire Régional C.D.L.L. de Champagne, comprenant l’Aube, l’Yonne, la Marne, la Haute-Marne et une partie de la Seine-et-Marne.
Il passa le commandement militaire du département de l’Aube à Jean Hoppenot.
En 1942 le C.D.L.L. passera un accord avec le mouvement « Vengeance » pour devenir « Ceux de la Libération Vengeance » C.L.V.
Fin juin 1942, le mouvement France Libre devint France Combattante, groupement devant englober toutes les organisations de Résistance. Jean Hoppenot chercha constamment à réaliser l’unité de cette résistance dans l’Aube.
Au cours de l’été 1942, un État Major aubois est esquissé sous sa direction - l’État Major national de l’Armée Secrète sera créé en octobre 1942.
Année 1943 - En mai / juin Jean Hoppenot chargé d’organiser la résistance du département, fit appel au Commandant Alagiraude dit « Montcalm », revenu de captivité en juin 1942. En effet, les agissements de ce dernier, et son attitude anti-allemande depuis cette époque, incitèrent Jean Hoppenot à faire appel à son concours pour organiser la partie militaire. Le commandant Alagiraude accepta immédiatement. Il mit sur pieds un plan personnel qui, par la suite, sera accepté par l’État-Major français.
Cette année 1943 fut cruciale pour la Résistance ; tous les mouvements sont créés. Par suite des appels pour le service du travail obligatoire en Allemagne, les réfractaires viendront grossir les effectifs, et tous les mouvements prennent de l’importance.
Le Chef Départemental de l’Armée Secrète crée deux organisations distinctes : l’une Territoriale, l’autre de Combat.
En août / septembre, le mouvement de Résistance de l’Aube prend le nom d’Armée Secrète (A.S.). La plus grande difficulté résida justement dans le secret qui devait être assuré à tous les échelons.
C’est aussi l’année des premiers sabotages spectaculaires et des premiers parachutages avec mise en service de postes émetteurs. L’affaire est lancée jusqu’au moment des arrestations qui provoquèrent des coupes sombres dans les rangs de la Résistance.
Les Allemands contraignaient des jeunes au Service du Travail Obligatoire en Allemagne (STO). Nombre de ces jeunes refusaient d’obéir et gagnaient les rangs de la résistance. Jean Hoppenot détenait des cartes d’identité vierges qu’il fournissait à ces récalcitrants pour dissimuler leur véritable identité et notamment leur date de naissance en cas de contrôle avant de gagner les maquis.
Le débarquement n’ayant pu avoir lieu comme prévu à l’automne 1943, les Allemands profitèrent de ce répit : avec l’aide d’agents doubles et de français vendus, ils décapitèrent la Résistance et plus tard traquèrent les Maquis.
À l’un de ses subordonnés Jean Hoppenot a déclaré avec un geste d’impatience : « toute mon organisation va être à recommencer, car mes chefs sont arrêtés et mes hommes enlevés comme travailleurs forcés. »
Bien que fin 1943, ces arrestations se soient multipliées, l’ensemble des Groupements de la Libération est en place.
Son commandement le fit accéder au grade de Lieutenant Colonel, nomination qui fut confirmée par la Commission Nationale d’Homologation.
Jean Hoppenot avait comme pseudonyme le nom de « Terreau » dans la Résistance. Il recevait de ses correspondants résistants des informations ou renseignements, notamment sur les positions des troupes allemandes, leurs effectifs dans la région de l’Aube, la localisation de terrains de parachutage, etc. Dans le document transmis par M. Deborre à Jean Hoppenot sous son pseudonyme figure en outre un renseignement concernant l’arrivée à Troyes d’un nommé Gaussot, traître à la solde de la Gestapo et dont il fallait se méfier.
La plupart de ses compagnons de clandestinité avaient été arrêtés au cours du mois de janvier.
Le samedi 5 février, les Allemands apprirent qu’il faisait « quelque chose » et la Gestapo l’arrêta au sortir de son bureau rue du Colonel Driant, alors qu’il devait se rendre à une cérémonie. Son arrestation fut ressentie comme une grosse perte pour la Résistance.
Mis au secret à la prison de Troyes rue Hennequin, il fut placé dans la même cellule que le Capitaine Bouguier. Sur son dossier figurait la note : « Activité P.S.F., grande influence sur ses ouvriers ».
Pour éviter des représailles sur sa famille, il fit annuler l’organisation d’une évasion que l’on préparait pour lui.
Du fait de sa très grande prudence, les Allemands ne purent connaître son rôle dans la Résistance qu’après d’autres arrestations…
En effet, avec l’aide d’un de ses employés M. Bourry à qui il avait donné des ordres formels, celui-ci put mettre en lieu sûr de nombreux documents compromettants et très précieux qui, avec l’accord de Madame Hoppenot, furent remis à la Résistance, dont entre autres :
- Projets de terrains de parachutages,
- Ordre de regroupement de tous les noyaux de la Résistance de la région,
- Liste d’agents de la Gestapo,
- Organisation et reprise des Services Publics le jour V,
- Organisation de l’Administration de toutes les villes du département et le nom des responsables.
En mars 1944, c’est le Lieutenant-Colonel Alagiraude dit « Montcalm » qui fut appelé à lui succéder : comme chef départemental des F.F.I., il avait sous ses ordres les nombreux maquis de l’A.S.
Le Vendredi Saint 31 mars Jean Hoppenot était transféré à Compiègne qu’il quitta comme déporté le jeudi 27 avril 1944 à 9 heures, lors d’un des derniers convois pour l’Allemagne, avec 1800 détenus.
Deux chefs se détachaient nettement du lot des résistants déportés, MM. Jean Hoppenot et Jean Lanez.
Après un voyage de 86 heures - et dans quelles conditions ! - ils arrivèrent à Auschwitz-Birkenau dimanche 30 avril à 18 heures. Ce camp était un des plus tristement célèbres de l’Allemagne hitlérienne.
Dans ce bagne, chaque baraquement dénommé Block était commandé par un « kapo », désigné généralement parmi les condamnés de droit commun allemands. Jean Hoppenot eut un kapo qui se montra particulièrement féroce.
Du 14 au 24 mai, il transite par le camp de Buchenwald.
Le jeudi 25 mai 1944, dans un convoi de 1000 déportés, il fut dirigé avec 27 Aubois sur Flossenbürg situé près de Weiden à quelques kilomètres de la frontière tchécoslovaque. Sa réputation n’était pas meilleure. Jean Hoppenot fut immatriculé sous le n° 9804.
Ils furent répartis entre différents commandos. Lui-même et M. Lanez refusèrent de travailler dans une usine de guerre Messerchmidt, et furent affectés au terrassement d’une carrière : ils payèrent de leur vie ce refus. Le travail était particulièrement épuisant : il fallait porter sur le dos pendant 10 heures d’énormes pierres, et les gardiens stimulaient à coups de trique ceux qui étaient exténués et n’en pouvaient plus : le terrassement étant un des plus durs de tous les travaux auxquels étaient astreints les forçats, ils arrivèrent assez vite au dernier stade de l’épuisement.
Jean Hoppenot était attaché au block 7, « un block infernal ». Les mauvais traitements étaient quotidiens mais il conserva toujours sa même force d’âme. Devenu d’une maigreur squelettique, il souffrit en outre d’un phlegmon au bras droit, dû à un coup de pioche donné par l’un de ses gardiens, et fut contraint d’abandonner son travail.
Après une semaine, un vendredi soir début novembre, Jean Hoppenot fut transféré au « Révier » - infirmerie - et n’eut plus aucun contact avec ses compagnons de déportation. La fièvre monta dès le lendemain matin. Il mourut le 15 novembre après avoir passé plusieurs mois dans ce camp d’extermination. Sur le registre du camp de Flossenbürg, il fut porté au regard de son nom : « Sorti le 15 novembre 1944 ».
Le Commissaire Central Tissot qui fut l’un de ses derniers camarades à le voir vivant, rapporte que jusqu’à son entrée au « Révier », il avait témoigné de sa foi, de sa confiance en l’avenir de sa patrie et qu’il ne regrettait rien.
« En pleine conscience, il avait accepté sa mort avec la résolution ardente et réfléchie des héros. »
La Croix de Guerre 39-45 avec étoile de vermeil (décision du 10 novembre 1945) et la Médaille de la Résistance Française (décret en date du 31 mars 1947) ont été décernées à Jean Hoppenot, à titre posthume.